L’urgence de protéger efficacement les captages d’eau potable

Résumé
Aujourd’hui en France, les captages d’eau potable sont insuffisamment protégés pour sécuriser cette ressource vitale et assurer l’accès à une eau de qualité. Le développement récent de la recherche de polluants a révélé une dégradation significative de la qualité de l’eau, faisant de sa protection un enjeu majeur de santé publique et de sauvegarde des écosystèmes. Il est de la responsabilité des autorités publiques de garantir une eau propre et saine, sachant que les traitements de potabilisation sont souvent insuffisants, extrêmement coûteux, et à la charge des collectivités et des usagers. La diminution des pollutions à la source reste la solution la plus efficace. Renforcer la protection des aires d’alimentation de captage est donc essentiel pour sécuriser l’approvisionnement en eau potable partout en France et préserver la qualité des ressources.Exposé des motifsLes scandales de pollution des terres, des eaux souterraines et de surface en France impliquent des polluants agricoles, industriels et ménagers[1] : algues vertes[2], dépôts sauvages, enfouissements non-surveillés, forages pétroliers à proximité de sources d’eau, contaminations diverses (Nestlé, Waters[3], Stocamine[4] , atrazine[5], chlordécone[6], chlorothalonil[7], métabolites du chloridazone[8], Pfas[9], etc.). La protection des Aires d’Alimentation de Captages (AAC) est donc une urgence de santé publique.Les AAC, surfaces terrestres où l’eau infiltrée alimente les captages, sont cruciales pour garantir la qualité de l’eau potable. Des mesures législatives et techniques existent pour protéger ces zones des pollutions, mais elles restent insuffisantes. Trois lois (1964, 1992, 2006) ont structuré la protection actuelle des captages. La loi de 1964 fut la première à instaurer des périmètres de protection, renforcée par la loi de 1992 et la loi LEMA (Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques) de 2006, qui ont solidifié le cadre de protection et introduit des outils de gestion durable comme les SAGE (Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux) et SDAGE (Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux).Les périmètres de protection incluent le PPI (Périmètre de Protection Immédiate), zone proche du captage avec activités fortement régulées, le PPR (Périmètre de Protection Rapprochée), qui encadre le PPI avec des restrictions pour éviter la pollution, et le PPE (Périmètre de Protection Éloignée), zone plus élargie avec des régulations plus souples. Les contraintes dans ces périmètres de protection, bien qu’indispensables, sont souvent insuffisantes pour restaurer ou garantir la qualité de l’eau.De nombreux captages sont fermés chaque année (plus de 4200 captages entre 1994 et 2023) sur tous les territoires en France en raison des pollutions diverses : nitrates, résidus médicamenteux, solvants chlorés, résidus de pesticides, etc. Cela appelle une législation plus rigoureuse.L’eau en bouteille, souvent vue comme alternative, est un contresens écologique, sanitaire, social et économique. Elle ne permet pas d’échapper aux pollutions, notamment plastique.La motion actuelle propose de renforcer la législation pour la protection des AAC, d’élargir et de durcir les mesures contre la pollution, pour assurer une eau potable de qualité pour tous. L’accompagnement des agriculteurs vers l’agroécologie et le zéro phyto est crucial pour réduire la pollution de l’eau, qui coûte aujourd’hui plus de 500 millions d’euros par an[10].
Motion
Le Conseil fédéral des Écologistes, réuni les 5 et 6 octobre 2024, préconise de :
- Inscrire dans la loi la sanctuarisation des Aires d’Alimentation de Captages d’eau potable (AAC)
Nous estimons que la protection renforcée et stricte des AAC est seule à même de reconquérir et garantir la qualité des eaux destinée à la consommation humaine. La réforme inclura une redéfinition et une réglementation plus strictes des Périmètres de Protection Immédiate (PPI), Rapprochés (PPR) et Éloignés (PPE), alignées sur les besoins réels de la ressource en eau. Des mesures spécifiques seront mises en place, telles que l’interdiction totale des pesticides de synthèse (d’ici 5 ans) et le blocage de nouveaux projets industriels et miniers qui menacent la qualité de l’eau. Ces changements s’accompagneront de sanctions renforcées en cas de non-respect des normes sanitaires et environnementales. La politique foncière doit être améliorée pour faciliter le droit de préemption par exemple en cas de velléité d’acquisition pour des projets incompatibles avec la préservation de la ressource.
Par conséquent, il est indispensable de renforcer les contrôles et les moyens de la police de l’eau et d’appliquer la politique de sanction aux pollueurs, qu’il s’agisse de l’usage de produits polluant ou de mauvaises pratiques (stockages inappropriés, déversements illégaux, présence de déchets, etc.) - Soutenir la transition agroécologique.
Pour permettre à tous les agricultrices et agriculteurs d’être actrices et acteurs de la préservation des ressources en eau, il importe de soutenir collectivement la transition de l’agriculture :- en sécurisant la transition (garantie de revenu pour l’engagement dans la transition en 3ans, fonds de financement de la transition, service public d’assurance agricole),
- en rémunérant sur la durée les pratiques favorables à l’environnement et la santé (paiement pour services environnementaux, MAEC (Mesures Agro-Environnementales et Climatiques), rétablissement de l’aide au maintien dans l’agriculture biologique),
- en intégrant dans les soutiens publics l’ensemble des acteurs des filières (développement de filières de diversification avec des contrats long terme, développement d’un maillage territorial d’unités de transformation, multiplication et mise en réseau des PAT (Projets Alimentaires Territoriaux), mobilisation de commandes publiques, etc.),
- en renforçant et mobilisant la recherche, la formation et le conseil.
- Soutenir financièrement la préservation et la reconquête de la qualité de l’eau
Les coûts de plus en plus élevés de traitement de l’eau potable causés par les pollutions ne doivent plus être supportés par les usagers. Le principe de pollueur-payeur doit être strictement appliqué pour financer :- toutes les mesures de traitements de l’eau potable induites par les pollutions générées,
- la dépollution et la restauration des milieux, notamment via des régimes de taxes et d’imposition spécifiques sur les bénéfices des pollueurs (producteurs et utilisateurs).